Il est temps qu'il ouvre son topic, lui qui arrivera l'été prochain au centre de formation et annoncé comme un crack
Article dans l'equipe du jour
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Foot
Le million de rêves d'Hannibal Mejbri, futur joueur de Monaco
Publié le mercredi 10 janvier 2018 à 18:30
Aujourd'hui à Clairefontaine, le prometteur Hannibal Mejbri a été recruté à prix d'or par Monaco, qu'il rejoindra cet été. Sa famille doit gérer au mieux la pression qui l'entoure depuis son enfance. Et qui illustre les enjeux de plus en plus grands autour des jeunes joueurs, auxquels L'Equipe consacre une enquête.
Alban Traquet
C'est un prénom qui claque. Hannibal. Comme le célèbre général carthaginois qui traversa les Pyrénées et les Alpes (au IIIe siècle avant J.-C.) «pour aller défier Rome», rappelle fièrement son père, Lotfi, un ancien militaire féru de littérature, aujourd'hui commerçant. C'est une coupe de cheveux, aussi : une tignasse frisée, qui rappelle celle de David Luiz, le défenseur de Chelsea. Déjà une marque de fabrique pour cet ado qui a grandi à Paris, quartier Gambetta (XXe arrondissement), avec ses deux frères et sa sœur, dans une famille d'origine tunisienne stricte et laborieuse.
Langues liées, question tabou
Car l'ASM a payé une somme hors norme pour attirer le jeune meneur de jeu, en marge de l'accord conclu entre le club et la famille. Grâce à un coup de poker paternel, réussi au début de l'été dernier. Très demandé, Hannibal était le dernier de sa promotion, à Clairefontaine, à ne pas encore avoir signé dans un club pro. Circonspect, son père avait interrogé d'autres parents : faut-il négocier une prime à la signature ? Et si oui, combien ? Les langues étaient liées ; la question, tabou. Face à l'insistance d'un poids lourd de Premier League (que son fils aurait pu rejoindre à seize ans), le commerçant a platement tenté sa chance, en annonçant un tarif : «Je connais le potentiel de mon fils, raconte cet ex-gardien de but amateur. J'ai dit qu'on était prêt à venir pour un million d'euros. Mais mon interlocuteur (celui du club anglais) n'était pas décideur et ne pouvait pas se prononcer tout de suite.»
Le hiatus profite à Monaco, qui a conclu l'affaire mais réfute avoir versé cette somme de un million d'euros. «Le chiffre est erroné et très loin de la réalité, même si des concurrents déçus font courir ce type de rumeur, affirme l'ASM. De grands clubs européens souhaitaient également le faire signer à des conditions proches de celles énoncées. Mais il a préféré venir à Monaco à des conditions moindres parce qu'il croit au projet.» «Beaucoup de gens disent : “Il a vendu son fils”, reprend le père d'Hannibal. Non : c'est un business. Tous les clubs se font de l'argent et leur matière première, ce sont les enfants.»
De son côté, la mère évacue doucement le sujet. «On aurait choisi Monaco même sans l'argent, dit-elle. La seule chose qui nous intéresse, c'est le bonheur de notre fils, une bonne formation et un bon encadrement.» «Mon devoir de père, c'est de garantir l'avenir du petit, reprend toutefois son mari. L'argent n'est pas une finalité, c'est un outil. Si un jour ça se passe mal, il faut qu'il puisse se retourner.»
Traité comme Pogba
Cette incertitude, Hannibal la connaît, car son poste et sa technique attirent les coups. Victime d'un tacle il y a un mois, il s'est fracturé l'épaule gauche en chutant et doit porter une attelle pendant plusieurs semaines. Le 16 décembre, un envoyé de l'ASM est passé aux nouvelles, dans le café parisien où la famille donne ses rendez-vous. Lors de sa visite médicale, début juillet, Hannibal avait eu droit aux mêmes égards. «Il a passé une visite de joueur pro, s'étonne son père. Ça a débuté au lever, à jeun, avec les premières analyses effectuées dans la chambre d'hôtel, pour se terminer à 21h30. On a attendu jusqu'à minuit pour que le médecin lise tous les rapports et donne son aval.»
(B.Desprez/L'Equipe)Comme les grands, Hannibal dispose d'un contrat individuel avec un équipementier, en l'occurrence Adidas. «Il est traité comme Paul Pogba (tête de pont de la marque allemande), constate son père. J'ai déjà reçu un responsable à 2h30 du matin pour qu'il me donne des crampons avec lesquels il devait jouer dès le lendemain.»
Ce tourbillon a débuté lors d'un tournoi en Bretagne, avec le Paris FC, son premier club, lorsque Hannibal avait neuf ans (il est actuellement licencié à l'ACBB, à Boulogne-Billancourt, dans les Hauts-de-Seine). «Un monsieur s'est présenté, qui disait travailler pour Rennes, se souvient Lotfi Mejbri. Il m'a dit que mon fils l'intéressait. Il était emballé. J'ai même été obligé de le calmer ! »
La rumeur d'un talent précoce enfle et dépasse rapidement les frontières françaises. Agents, scouts et «conseillers» en tous genres sollicitent inlassablement les Mejbri. «On ne fait confiance à personne», tranche la maman. «Il faut construire des remparts, on n'est jamais mieux servi que par soi-même», ajoute le papa. Ils ont un avocat, mais toujours pas d'agent. «J'ai compris vers onze ou douze ans qu'une nouvelle vie commençait, souffle Hannibal, qui tient pour modèle Andrés Iniesta. Au début, je ne me rendais pas compte de cette attente autour de moi. Je ne peux pas faire les erreurs d'un enfant classique. J'ai été habitué à porter l'équipe, montrer l'exemple et faire partie des leaders.»
En juin 2015, quand il a remporté la finale française de la Danone Nations Cup (plus grande compétition mondiale des 10-12 ans) avec le PFC, son prénom tapait déjà aux tympans des principaux scouts européens. Les meilleurs clubs anglais étaient à l'affût, tout comme le PSG, Lyon, Monaco ou Rennes (encore). Paris avait insisté, via Bertrand Reuzeau, alors directeur du centre de formation. Des premiers contacts qui lui auront servi deux ans plus tard, après son arrivée à la tête de l'académie monégasque (en juin 2016). «Il nous connaît bien, note la mère. C'est un repère. On était à l'aise quand on l'a retrouvé.» Mais à l'été 2016, Hannibal a tranché : ce sera Clairefontaine, dont il a réussi les tests d'entrée.
Mais un grave accident, survenu en 2006, l'a handicapé. Un destin aux signaux contradictoires, impossibles à rationnaliser : Radhia a mis Hannibal au monde à quarante-six ans, un événement inattendu ; trois ans plus tard, l'accident d'Emine a fait vaciller la famille. «Ce malheur nous a freinés, poursuit-elle. Mais c'est une très bonne expérience pour Hannibal, ça le forge. Quand je suis fatigué, c'est lui qui le masse, c'est très beau.»
Elle sait son petit dernier à un tournant. La possibilité d'un futur dans le foot pro accélère les priorités. « Avant, ses cahiers étaient une merveille, reprend-elle. Mais il change. Il dit qu'il s'ennuie à l'école. Pour la première fois, sa moyenne est descendue à dix. » Alors, en fin d'année dernière, elle l'a privé quelques jours de téléphone portable. Punition des temps modernes.
Article dans l'equipe du jour
Spoiler:
Foot
Le million de rêves d'Hannibal Mejbri, futur joueur de Monaco
Publié le mercredi 10 janvier 2018 à 18:30
Aujourd'hui à Clairefontaine, le prometteur Hannibal Mejbri a été recruté à prix d'or par Monaco, qu'il rejoindra cet été. Sa famille doit gérer au mieux la pression qui l'entoure depuis son enfance. Et qui illustre les enjeux de plus en plus grands autour des jeunes joueurs, auxquels L'Equipe consacre une enquête.
Alban Traquet
C'est un prénom qui claque. Hannibal. Comme le célèbre général carthaginois qui traversa les Pyrénées et les Alpes (au IIIe siècle avant J.-C.) «pour aller défier Rome», rappelle fièrement son père, Lotfi, un ancien militaire féru de littérature, aujourd'hui commerçant. C'est une coupe de cheveux, aussi : une tignasse frisée, qui rappelle celle de David Luiz, le défenseur de Chelsea. Déjà une marque de fabrique pour cet ado qui a grandi à Paris, quartier Gambetta (XXe arrondissement), avec ses deux frères et sa sœur, dans une famille d'origine tunisienne stricte et laborieuse.
En bref
Hannibal Mejbri
14 ans
Milieu de terrain
2015 : en juin, remporte la Danone Nations Cup avec le Paris FC
Mais Hannibal Mejbri, bientôt quinze ans, c'est surtout un jeune milieu prometteur, très tôt courtisé et convoité par les plus gros clubs d'Europe. Une «pépite» qui termine sa deuxième année à Clairefontaine et qui rejoindra Monaco le 30 juin prochain. Le fruit d'un projet collégial et d'une transaction exceptionnelle.Hannibal Mejbri
14 ans
Milieu de terrain
2015 : en juin, remporte la Danone Nations Cup avec le Paris FC
Langues liées, question tabou
Car l'ASM a payé une somme hors norme pour attirer le jeune meneur de jeu, en marge de l'accord conclu entre le club et la famille. Grâce à un coup de poker paternel, réussi au début de l'été dernier. Très demandé, Hannibal était le dernier de sa promotion, à Clairefontaine, à ne pas encore avoir signé dans un club pro. Circonspect, son père avait interrogé d'autres parents : faut-il négocier une prime à la signature ? Et si oui, combien ? Les langues étaient liées ; la question, tabou. Face à l'insistance d'un poids lourd de Premier League (que son fils aurait pu rejoindre à seize ans), le commerçant a platement tenté sa chance, en annonçant un tarif : «Je connais le potentiel de mon fils, raconte cet ex-gardien de but amateur. J'ai dit qu'on était prêt à venir pour un million d'euros. Mais mon interlocuteur (celui du club anglais) n'était pas décideur et ne pouvait pas se prononcer tout de suite.»
«Tous les clubs se font de l'argent et leur matière première, ce sont les enfants» - Lotfi Mejbri, père de Hannibal
Le hiatus profite à Monaco, qui a conclu l'affaire mais réfute avoir versé cette somme de un million d'euros. «Le chiffre est erroné et très loin de la réalité, même si des concurrents déçus font courir ce type de rumeur, affirme l'ASM. De grands clubs européens souhaitaient également le faire signer à des conditions proches de celles énoncées. Mais il a préféré venir à Monaco à des conditions moindres parce qu'il croit au projet.» «Beaucoup de gens disent : “Il a vendu son fils”, reprend le père d'Hannibal. Non : c'est un business. Tous les clubs se font de l'argent et leur matière première, ce sont les enfants.»
De son côté, la mère évacue doucement le sujet. «On aurait choisi Monaco même sans l'argent, dit-elle. La seule chose qui nous intéresse, c'est le bonheur de notre fils, une bonne formation et un bon encadrement.» «Mon devoir de père, c'est de garantir l'avenir du petit, reprend toutefois son mari. L'argent n'est pas une finalité, c'est un outil. Si un jour ça se passe mal, il faut qu'il puisse se retourner.»
Traité comme Pogba
Cette incertitude, Hannibal la connaît, car son poste et sa technique attirent les coups. Victime d'un tacle il y a un mois, il s'est fracturé l'épaule gauche en chutant et doit porter une attelle pendant plusieurs semaines. Le 16 décembre, un envoyé de l'ASM est passé aux nouvelles, dans le café parisien où la famille donne ses rendez-vous. Lors de sa visite médicale, début juillet, Hannibal avait eu droit aux mêmes égards. «Il a passé une visite de joueur pro, s'étonne son père. Ça a débuté au lever, à jeun, avec les premières analyses effectuées dans la chambre d'hôtel, pour se terminer à 21h30. On a attendu jusqu'à minuit pour que le médecin lise tous les rapports et donne son aval.»
Spoiler:
(B.Desprez/L'Equipe)Comme les grands, Hannibal dispose d'un contrat individuel avec un équipementier, en l'occurrence Adidas. «Il est traité comme Paul Pogba (tête de pont de la marque allemande), constate son père. J'ai déjà reçu un responsable à 2h30 du matin pour qu'il me donne des crampons avec lesquels il devait jouer dès le lendemain.»
Ce tourbillon a débuté lors d'un tournoi en Bretagne, avec le Paris FC, son premier club, lorsque Hannibal avait neuf ans (il est actuellement licencié à l'ACBB, à Boulogne-Billancourt, dans les Hauts-de-Seine). «Un monsieur s'est présenté, qui disait travailler pour Rennes, se souvient Lotfi Mejbri. Il m'a dit que mon fils l'intéressait. Il était emballé. J'ai même été obligé de le calmer ! »
La rumeur d'un talent précoce enfle et dépasse rapidement les frontières françaises. Agents, scouts et «conseillers» en tous genres sollicitent inlassablement les Mejbri. «On ne fait confiance à personne», tranche la maman. «Il faut construire des remparts, on n'est jamais mieux servi que par soi-même», ajoute le papa. Ils ont un avocat, mais toujours pas d'agent. «J'ai compris vers onze ou douze ans qu'une nouvelle vie commençait, souffle Hannibal, qui tient pour modèle Andrés Iniesta. Au début, je ne me rendais pas compte de cette attente autour de moi. Je ne peux pas faire les erreurs d'un enfant classique. J'ai été habitué à porter l'équipe, montrer l'exemple et faire partie des leaders.»
Il avait pris un an d'avance à l'école avant d'intégrer Clairefontaine
En juin 2015, quand il a remporté la finale française de la Danone Nations Cup (plus grande compétition mondiale des 10-12 ans) avec le PFC, son prénom tapait déjà aux tympans des principaux scouts européens. Les meilleurs clubs anglais étaient à l'affût, tout comme le PSG, Lyon, Monaco ou Rennes (encore). Paris avait insisté, via Bertrand Reuzeau, alors directeur du centre de formation. Des premiers contacts qui lui auront servi deux ans plus tard, après son arrivée à la tête de l'académie monégasque (en juin 2016). «Il nous connaît bien, note la mère. C'est un repère. On était à l'aise quand on l'a retrouvé.» Mais à l'été 2016, Hannibal a tranché : ce sera Clairefontaine, dont il a réussi les tests d'entrée.
Spoiler:
Mais un grave accident, survenu en 2006, l'a handicapé. Un destin aux signaux contradictoires, impossibles à rationnaliser : Radhia a mis Hannibal au monde à quarante-six ans, un événement inattendu ; trois ans plus tard, l'accident d'Emine a fait vaciller la famille. «Ce malheur nous a freinés, poursuit-elle. Mais c'est une très bonne expérience pour Hannibal, ça le forge. Quand je suis fatigué, c'est lui qui le masse, c'est très beau.»
Elle sait son petit dernier à un tournant. La possibilité d'un futur dans le foot pro accélère les priorités. « Avant, ses cahiers étaient une merveille, reprend-elle. Mais il change. Il dit qu'il s'ennuie à l'école. Pour la première fois, sa moyenne est descendue à dix. » Alors, en fin d'année dernière, elle l'a privé quelques jours de téléphone portable. Punition des temps modernes.
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