Pétri de talent, toujours élégant, parfois génial, Glenn Hoddle a illuminé le football anglais de toute sa classe dans les années 80. Sélectionné à 53 reprises en équipe d'Angleterre, son nom reste attaché à la formidable génération des années 80, et surtout au club de ses débuts, Tottenham, dont les fans viennent de l'élire meilleur joueur de l'histoire du club. Born was the King of White Hart Lane...
Les débuts d'un surdoué
Né à Hayes, dans le Middlesex, Glenn Hoddle grandit à Harlow, où sa famille avait déménagé. C'est là qu'il apprend à jouer au football. C'est là également qu'il se blesse une première fois au genou, assez sérieusement, à l'adolescence. Blessure dont il ne se relèvera jamais totalement. Mais c'est surtout là que Martin Chivers, alors attaquant vedette de Tottenham, le repère lors d'un tournoi local. Sidéré par le talent du gamin, Chivers le convainc d'aller tenter sa chance chez les Spurs. Hoddle n'a pas encore 17 ans. Commence ainsi l'itinéraire d'un enfant de la balle incroyablement gâté par la nature, dont les dons vont faire le bonheur de Tottenham pendant plus d'une décennie.
Nous sommes alors au milieu des années 70 et Tottenham vit une période de transition assez trouble. Après 16 ans de règne, Bill Nicholson vient de quitter son poste de manager. La succession est laborieuse. Contre l'avis de Nicholson lui-même, Terry Neill prend les rênes de l'équipe. Ce dernier ne marquera pas l'histoire des Spurs, mais il a le mérite de lancer Hoddle dans le grand bain en août 1975 face à Norwich. Six mois plus tard vient sa première titularisation, face à Stoke City. Hoddle ouvre la marque, trompant Peter Shilton d'une frappe lointaine. Le premier de ses 110 buts sous le maillot blanc.
Adulé et controversé
Dès la saison 1977-78, Glenn Hoddle s'impose comme le dépositaire du jeu de Tottenham et le restera pendant dix ans. Mais le bonhomme divise. Son talent hors normes n'est pas en doute, mais certains le trouvent peu combatif, une qualité très prisée outre-Manche. De nombreux supporters lui reprochent cette attitude nonchalante. Non sans raison d'ailleurs. Rechignant au combat, abhorrant le tacle, Hoddle n'hésite pas à se "cacher" pour éviter la blessure. Du moins dans ses très jeunes années.
Au fil des ans, il travaillera dans ce domaine, s'impliquant davantage dans des tâches plus ingrates comme la récupération. N'empêche, il traînera longtemps cette réputation, de moins en moins justifiée, qui lui vaudra d'être considéré comme le moins "British" des joueurs anglais. Pas forcément un compliment car le supporter anglais aime autant l'engagement, le don de soi, que le talent naturel et le don tout court, qui ne recèle finalement aucun mérite. Il ne faut donc pas s'étonner si Hoddle décida, une fois la trentaine venue, d'aller explorer un autre football.
L'âge d'or
Dès la saison 1977-78, Hoddle s'affirme comme un titulaire indiscutable chez les Spurs. Les arrivées du champion du monde argentin Osvaldo Ardiles, de l'Ecossais Steve Archibald et de Tony Gavin, conjuguées au talent unique d'Hoddle, offrent à Tottenham un milieu de terrain de premier ordre. Le début des années 80 est faste pour le club du Nord de Londres, qui accroche deux Cups consécutives, en 1981 et 1982. Lors de ce deuxième voyage à Wembley, Hoddle inscrit lui-même le but de la victoire, sur penalty. En championnat, Tottenham accroche la quatrième place en 1983, ce qui lui vaut une qualification pour la Coupe UEFA, épreuve que l'équipe remporte en mai 1984, battant Benfica en finale.
Mais Hoddle n'a pas pris part à ce triomphe. Blessé, le meneur de jeu anglais rate toute la fin de saison, et ne reviendra qu'au cours de la saison suivante. Lorsqu'il retrouve le terrain, début 85, les Spurs sont en course pour le titre, à la lutte avec Everton. Pour la première fois depuis un quart de siècle, le titre est sur le point de revenir à White Hart Lane. Sur le point seulement, car Tottenham devra s'incliner. Ce qui aurait pu être le point d'orgue de la carrière de Glenn Hoddle marquera en fait le début du déclin pour cette génération. En 1987, il dispute son dernier match sous le maillot blanc, à Wembley, en finale de la Cup contre Coventry. Et s'en va sur une défaite…
Sélection: Les regrets éternels
Ceux qui sont nés suffisamment tôt pour avoir connu la génération sacrée championne du monde en 1966 devant Sa Majesté sont quasi-unanimes: l'équipe d'Angleterre des années 80 était aussi douée, si ce n'est plus, que sa devancière. Pourtant, elle n'a jamais brillé dans les grandes compétitions internationales, notamment lors des Coupes du monde 1982 et 1986. Le talent d'Hoddle, associé à celui de Keegan, Francis, Robson ou Mariner (1982) puis à celui de Lineker, Hateley ou Wilkins (1986), ne permettra pas à l'Angleterre de franchir le cap des quarts de finale. Hoddle disputera également deux phases finales de Championnat d'Europe, en 1980 et 1988. Sans plus de succès. L'Euro 88 en Allemagne vire même au fiasco. Trois matches, trois défaites au premier tour. La dernière, face à l'URSS (1-3) est de trop pour Hoddle. Ce jour là, il honore la dernière de ses 53 sélections en équipe d'Angleterre, au cours desquelles il aura inscrit huit buts.
Le Prince du Rocher
Une fois la trentaine venue, Hoddle sent son histoire avec Tottenham touche à sa fin. L'Anglais a le sentiment d'avoir fait le tour de la question et répond aux sirènes monégasques à l'été 1987 (pour 7,5m de francs), en compagnie d'un autre Anglais, Mark Hateley. L'ASM, alors dirigée par un certain Arsène Wenger, survole le championnat et de France et décroche le titre en juin 1988. Hoddle, malgré un genou en compote, brille sous le maillot rouge et à blanc, au point d'être désigné meilleur étranger de l'hexagone.
La suite s'avère moins brillante. Les blessures perturbent de plus en plus Hoddle, dont les passages à l'infirmerie de la Turbie sont de plus en plus fréquentes. Le jeu monégasque en pâtît, les résultats aussi. Le magicien doit souvent se contenter de jouer une mi-temps, ou de rentrer à une demi-heure de la fin, comme lors du quart de finale de Coupe des champions, perdu face à Galatasaray. Début 1990, le club décide de rompre son contrat. Hoddle met un terme à sa carrière. Mais outre le titre glané, il n'a pas perdu son temps en Principauté. C'est au contact de Wenger que le goût du management lui est venu. Dès 1991, il entame à Swindon une nouvelle vie, une nouvelle carrière, qui le mènera jusqu'à la tête de l'équipe d'Angleterre.